Synopsis
« Max, Vivian et Tom, 13 ans, sont inséparables. Ce début d’été est plein de bouleversements : la dernière usine de leur petite ville des Ardennes ferme tandis que Seb, le grand frère de Max, sort de prison. Ses combines vont peu à peu entraîner les trois adolescents dans une chute qui paraît inéluctable… »
Premier long-métrage du jeune réalisateur Michaël Dichter, Les Trois Fantastiques débarque dans nos salles alors qu’un certain Festival de Cannes bat son plein sur la croisette. Une sortie loin des feux des projecteurs, mais qui n’a pas échappé aux yeux de votre fidèle serviteur.
Adapté de son propre court-métrage, Pollux (2020), Les Trois Fantastiques marque l’entrée de Dichter dans le monde impitoyable des long-métrages. Ce monde où rien ne vous garantit que votre premier essai ne sera pas également votre dernier, si celui-ci venait à ne pas trouver son public en salles. Et pourtant, les premiers films sont souvent les plus passionnants. Maladroit, foisonnant d’idées, petit miracle, ils sont la représentation d’une envie de cinéma frôlant souvent l’urgence.
Indubitablement, Les Trois Fantastiques coche toutes ces cases. Sorte de Stand by Me à la française, le film démarre en suivant un chemin relativement bien balisé : Max, Vivian et Tom, un groupe de trois amis qui s’apprête à vivre un dernier été ensemble, voient leur engouement freiner par un élément perturbateur qui vient briser cette naïveté de l’enfance. Cet élément perturbateur, c’est Raphaël Quenard, alias Seb, le grand frère du jeune Max. Fraîchement sorti de prison, son personnage est le point de départ d’un récit plutôt attendu, enchaînant les ressorts scénaristiques à coups de “la violence entraîne la violence” ou encore “rien n’est plus important que la famille. Plusieurs fusils de Tchekhov sont introduits dès les premières minutes du film, ne laissant que peu de surprises sur les événements tragiques à venir (Raphaël Quenard qui ramène un flingue à la maison sous les yeux médusés de son petit frère, c’est évidemment une grosse ficelle dont on aurait pu se passer). Cette naïveté scénaristique rappelle d’ailleurs le récent La Petite Bande, de Pierre Salvadori (2022), qui malgré toutes les bonnes intentions du monde, ne décollait jamais vraiment, à cause notamment de sa lourdeur scénaristique.
Et pourtant, Les Trois Fantastiques parvient à décoller. Déjà grâce à son trio de jeunes comédiens particulièrement attachant, à commencer par la révélation Diego Murgia, qu’on avait déjà pu entrevoir dans le superbe Dalva (2023) de Emmanuelle Nicot. Au milieu de cette jeunesse rattrapée par la violence de la vraie vie, Raphaël Quenard est terrifiant, bien loin de son personnage clownesque habituel, passant du grand frère protecteur au criminel rongé par le regret et la folie. Emmanuelle Bercot trouve également sa place, en mère de famille dépassée, mais prête à tout pour sauver les dernières miettes d’une famille en chute libre.
Le film, jusqu’alors plutôt mignon, mais jamais vraiment percutant, nous invite à monter dans un train fantôme pour ne plus jamais nous lâcher. Emporté par la folie de son grand frère, le jeune Max semble inévitablement destiné à suivre les traces de cette figure fraternelle, bien décidée à l’emporter avec lui dans sa perte. Rattrapée par les horreurs de la réalité sur un fond social de plus en plus présent (l’usine du village s’apprête à fermer, comment garder son âme d’enfant face à la dureté d’une telle réalité ?), la bande d’amis à priori inséparable, est elle aussi tiraillée.
Brutal, violent (une scène de harcèlement scolaire filmée frontalement, sans artifices, sûrement la scène la plus terrifiante du film) et finalement particulièrement émouvant, Les Trois Fantastiques réussit finalement son coup, en donnant toute la place à ses jeunes acteurs, bien décidés à conquérir un monde qui est déjà le leur.