
Synopsis
Quelque part sur internet existe un espace de 250 km² dans lequel des individus se regroupent en communauté pour simuler une fiction survivaliste. Sous les traits d’avatars, une équipe de tournage pénètre ce lieu et entre en contact avec des joueurs. Qui sont ces habitants ? Sont-ils réellement en train de jouer ?

À une époque où les frontières entre réel et virtuel s’effacent de plus en plus, où l’on cherche des échappatoires à la monotonie du quotidien, Knit’s Island se pose comme une œuvre particulièrement novatrice. Ce documentaire hors normes nous entraîne dans une aventure à la fois familière et étrangère, façonnée à partir des pixels de DayZ, un jeu vidéo post-apocalyptique.
Le projet Knit’s Island est né d’une envie d’exploiter les frontières entre cinéma et jeu vidéo, une aventure initiée par trois cinéastes français : Ekiem Barbier, Guilhem Causse, et Quentin L’helgoualc’h. Ce trio n’en était pas à son coup d’essai dans le monde du machinima (création d’un film à partir d’un univers virtuel, comme celui d’un jeu vidéo); ils avaient déjà posé les bases de leur démarche dans leur moyen métrage Marlow Drive, réalisé à partir d’images du jeu GTA V. Ce film leur avait permis d’expérimenter les possibilités offertes par le machinima, ouvrant la voie à des formes narratives inédites.
L’idée de Knit’s Island a émergé de la fascination des trois cinéastes pour DayZ, un simulateur de survie en ligne qui se déroule dans un univers post-apocalyptique peuplé de zombies et de survivants. Ce jeu, réputé pour son réalisme et sa brutalité, attire des joueurs du monde entier qui y vivent des expériences plus vraies que nature. Les cinéastes ont perçu en DayZ non seulement un terrain de jeu, mais aussi un véritable microcosme où se cristallisent les tensions, les espoirs et les angoisses de notre époque.

Dans Knit’s Island, les réalisateurs, par l’intermédiaire de leurs avatars, s’introduisent dans l’univers du jeu pour rencontrer et interroger des joueurs de divers horizons. Le film ne cherche pas à narrer une fiction, mais à capturer la réalité d’un monde virtuel où les participants expriment des pulsions, des désirs et des réflexions qui brouillent la distinction entre le réel et le numérique. À travers des milliers d’heures de jeu, les cinéastes documentent des scènes étranges, parfois inquiétantes, telles que des rituels cannibales ou des cérémonies funéraires, qui révèlent l’intensité et la complexité sociale du monde de DayZ.
Là où d’autres auraient simplement vu un terrain de jeu déconnecté du monde, les cinéastes ont perçu une toile sur laquelle peindre les contours de notre société. Ils ont choisi de ne pas se contenter d’observer de loin, mais de plonger tête la première dans cet univers numérique, incarnant leurs avatars pour explorer non seulement les paysages dévastés de ce monde virtuel, mais aussi les esprits de ceux qui y déambulent, à la recherche d’une forme de vérité, de rédemption, ou simplement d’un lieu où exister autrement.
Au-delà des clichés habituels qui associent les jeux vidéo à l’addiction et à la violence gratuite, Knit’s Island révèle une dimension bien plus profonde : celle d’un espace où la violence n’est pas seulement une pulsion, mais parfois un langage, où la solitude devient un compagnon de route, et où chaque rencontre est une lueur d’humanité dans un monde déshumanisé. Les décors, d’une beauté mélancolique, contrastent avec les mouvements rigides des avatars, mais ce sont ces mêmes avatars qui, avec leurs voix humaines, nous racontent des histoires qui semblent si réelles, sinon plus, que celles vécues « in real life ».

Knit’s Island parvient à capturer une certaine hybridité de l’expérience numérique, mêlant le réel et le virtuel de manière indissociable. Le film nous plonge dans un univers où les joueurs adoptent des rôles variés, certains devenant des figures religieuses ou des leaders de communautés, d’autres des solitaires en quête de sens dans un monde numérique désertique. Les avatars, bien que digitaux, sont imprégnés des voix et des émotions humaines qui les animent, rendant leur présence étrangement tangible.
À travers les yeux numériques des avatars, nous sommes invités à contempler non seulement un monde post-apocalyptique, mais aussi les paysages intérieurs de ceux qui y vivent, jouent, et parfois se perdent. Le film capture la beauté fragile d’une humanité en quête de sens, même dans les recoins les plus inattendus.
Au terme de ce voyage, une vérité douce-amère émerge : peu importe où nous nous trouvons, nous sommes tous en quête de connexion, de communauté, et d’un lieu où nos voix, nos histoires, peuvent résonner. Knit’s Island nous rappelle que, même dans les espaces les plus dématérialisés, les émotions restent réelles, les souvenirs indélébiles, et l’humanité, vibrante.
Knit’s Island, l’île sans fin, c’est la pépite inattendue de cette année 2024, à découvrir dès maintenant en VOD.
